Malgré la hausse des prix et la baisse du pouvoir d’achat des Français, le commerce spécialisé affiche un bon mois de septembre 2022, par rapport à la même période en 2021. D’après les derniers chiffres révélés par Procos.
L’activité du commerce spécialisé durant le mois de septembre 2022 a enregistré de bons chiffres. Et ce malgré le contexte économique que l’on connaît, entre hausse du coût des matières premières, tensions sur la chaîne d’approvisionnement (créant des ruptures de stock dans les magasins) et baisse du pouvoir d’achat des français. Ces derniers contraints de limiter, sinon exclure leurs déplacements en magasin (centre-ville et centre commercial).
“L’activité connaît en effet une hausse de +7 % en magasin, à surface égale, alors qu’à titre de comparaison, celle-ci ne s’élevait qu’à 5,5 % en 2019. Ce mois de septembre est également le premier mois, depuis février 2022, qui aura connu, pour les enseignes, une hausse considérable des ventes internet par rapport à 2021 ( + 4,7 %) alors que celles-ci baissaient depuis sept mois”, ont révélé, lors d’une conférence de presse à Paris, mardi 18 octobre,
Emmanuel Le Roch, délégué général de Procos et
Laurence Paganini, présidente de la fédération.
Des performances épisodiques que l’on doit à plusieurs facteurs et à un certain effet de saisonnalité. Il faut noter le retour des touristes ayant relancé l’activité dans certaines régions après deux années difficiles (Paris et région PACA), notamment dans le secteur de l’hôtellerie. Face à la hausse des prix, les enseignes discount (entrée de gamme/discount), plus plébiscitées par les consommateurs qu’auparavant (en termes de volumes de ventes) ont enregistré des surperformances.
Les tensions grandissantes du marché
Pour autant, le délégué général de Procos ne cache pas ses inquiétudes pour les mois à venir. Les adhérents font d’ores et déjà face à des pénuries de carburant qui impactent considérablement la fréquentation de leurs points de vente (et la mobilité des collaborateurs et des salariés de ces enseignes). Procos rappelle que
70 % des Français dépendent aujourd’hui d’un véhicule. “
La fréquentation a baissé de -20 % dans les centres commerciaux de périphérie touchés par les difficultés de mobilité. Je cite, parmi quelques exemples, les régions Bretagne, Bourgogne-Franche-Comté ou encore le Centre-Val de Loire où il y a des blocages aux stations-service, poursuit Emmanuel Le Roch. Et d’indiquer, à titre de comparaison : “
la fréquentation des points de vente reste durablement inférieure à celle de 2019 à la fois dans les centres-villes ou dans les centres-commerciaux avec une moyenne à -15 %”. Par ailleurs, il convient de relativiser cette dynamique de rentrée car septembre ne représente pas un gros mois, notamment pour les enseignes de l’habillement pour adulte.
D’autre part, le commerce spécialisé, qui se relève lui aussi de la pandémie, affiche toujours des ventes en retrait par rapport à 2019 (toutes enseignes confondues) avec -2,5 %, pour les magasins et -1, 5% en cumulant les ventes magasins et internet (dont le click and collect).
Certaines enseignes affichent d’ailleurs des chiffres bien en deçà de la période d’avant Covid. Parmi elles, celles qui sont issues du secteur de la chaussure (-10,2 %), de l’habillement (-6,5 %), de la beauté-santé (-4,5 %) ou encore de la culture, des jouets et des cadeaux (- 4,5 %). Et sans oublier le bricolage (-4,2 %) et l’électroménager (- 6,9 %). En revanche, trois secteurs, même s’ils demeurent en retrait par rapport à 2021, affichent une croissance supérieure à 2019 sur la période : l’alimentaire spécialisé (dont les épiceries, avec +16,2 %), l’équipement de la maison (+ 6,4 %) et le sport (+5 %). La restauration à table, elle, peine à retrouver sa fréquentation d’avant-crise, tant à cause de la hausse du prix des menus et des denrées que la généralisation du télétravail des Français.
Le commerce spécialisé, encore à la peine par rapport à 2019
“On observe déjà ce phénomène dans le quartier de la Défense en semaine avec, par exemple, une fréquentation de -30 %, par rapport à celle de 2019. Et celle du samedi est revenue à -5 %. La fréquentation du samedi est maintenant égale à 2/3 de celle de la semaine alors qu’elle était de 50 % avant la crise du Covid. Et Emmanuel Le Roch de préciser la situation de la restauration cette fois :
Le secteur est à -7 % et est aussi marqué par la poursuite de la livraison, qui ne croît plus mais reste très supérieure à l’avant-Covid. Néanmoins, la restauration rapide est dynamique et affiche +5 %.”
Reste à savoir comment les commerçants pourront pérenniser leur activité, se créer des marges mais sans crisper davantage
les ménages français, déjà confrontés à des arbitrages en matière de dépenses quotidiennes (soit des achats de contrainte type alimentaire, carburant, ou énergie en augmentation). Les enseignes doivent également faire face à leurs coûts d’exploitation au regard de la hausse de l’ILC. Il faut également répondre aux attentes des bailleurs pour ne pas risquer de nouvelles fermetures alors que les commerces ont été contraints de fermer le rideau à plusieurs reprises pendant les confinements successifs.
D’autant que, comme le rappelle Emmanuel Le Roch, “
les cumuls des ventes magasin et web ne leur permettent pas de retrouver le niveau de 2019, sauf pour ce mois de septembre 2022.” Enfin, même si l’inflation reste très fortement ressentie par les consommateurs, celle-ci est estimée à 6% en France, contre plus de 10 % chez nos voisins allemands (7,9 % en août 2022) et à 10,4 % (en août 2022) en Espagne. “
Procos est en discussions avec Bercy pour tenter d’apporter des éléments de réponse pour l’avenir du commerce spécialisé. Tant sur les blocages énergétiques qu’autour des discussions bailleurs-preneurs, ou encore autour de la suppression de la CVAE (la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises). Il faut agir vite car le risque de décommercialisation et de dévitalisation de certains territoires n’a jamais été aussi fort. Or, il faut faire du commerce et de ses entreprises, le fer de lance de la transition écologique, de l’inclusion et de la compétitivité”, conclut de son côté Laurence Paganini, présidente de Procos, qui demande également au Gouvernement, des mesures concrètes pour le plan “Commerce 2030”.