Ne pas payer vos redevances en cas de difficultés financières ou si vous êtes mécontent des services du franchiseur comporte un risque important. Mieux vaut établir le dialogue, ou mettre en demeure la tête de réseau si vous ne vous sentez pas écouté, afin de le faire réagir.
Même si le franchiseur et le franchisé sont liés par un contrat qui inclut le versement régulier de redevances, il peut arriver que celles-ci ne soient plus réglées en temps et en heure.
“En général, on observe deux cas de figure, constate Hélène Helwaser, avocat au Barreau de Paris.
Il se peut que le franchisé cesse de payer car il n’est pas satisfait des prestations de son franchiseur. Ou alors il ne paie pas car il n’en a pas les moyens, son entreprise n’étant pas rentable.” Sur ce dernier scénario il se peut que le concept ne soit pas rentable ou que la conjoncture soit mauvaise.
“Parfois ce n’est ni la faute du franchiseur ni celle du franchisé”, souligne Hélène Helwaser.
Demander de l’aide
Dans tous les cas, l’avocat conseille au franchisé d’essayer de ne jamais cesser de payer ses redevances car il se met en faute et il risque la résiliation du contrat même s’il voulait poursuivre son activité.
“Il faut dans un premier temps essayer de demander de l’aide auprès du franchiseur, conseille Hélène Helwaser.
Ce dernier peut apporter des conseils précieux mais il ne faut pas oublier qu’il est aussi en droit, au bout de deux ou trois mois, de mettre en demeure le franchisé et le contrat peut être résilié.”
À l’inverse le franchisé peut également mettre en demeure sa tête de réseau pour lui demander de respecter ses obligations s’il estime ne pas bénéficier de toute l’assistance prévue au départ ou s’il juge que le réseau est obsolète et que rien n’est fait pour remédier à cette situation. Même dans ce cas, il est conseillé de ne pas arrêter de payer, le franchisé peut saisir le juge qui donnera suite à la procédure et verra si les accusations sont suffisantes.
Seulement si le juge estime a posteriori que les motifs étaient réels, l’exception d’inexécution peut être soulevée.
“Le franchisé doit être très prudent pour ne pas se mettre en tort”, insiste Hélène Helwaser.
Après cette première analyse, il faut être conscient que ce type de situation est assez courant.
“Dans un monde idéal, tout le monde paie et à la bonne date mais ce n’est pas toujours le cas, remarque Rémi de Balmann, responsable du département distribution et franchise du cabinet D, M & D et associé-gérant.
Aujourd’hui, compte tenu de la conjoncture difficile, les commerçants essaient de gagner du temps ici ou là pour payer leurs redevances sans mesurer qu’ils sont en train d’asphyxier la tête de réseau. C’est un cas malheureux qu’il faut essayer de maîtriser.”
Risque de résiliation
Selon le spécialiste, il ne faut pas oublier que pour assurer la bonne exécution de l’obligation de paiement, les contrats de franchise comportent le plus souvent une clause résolutoire aux termes de laquelle, passé un certain délai après l’envoi d’une mise en demeure, le franchiseur peut résilier le contrat aux torts du franchisé défaillant. Dans cette perspective, Rémi de Balmann fait référence à un arrêt daté du 7 septembre 2016 dans lequel la cour d’appel de Paris a rappelé que
“les manquements du franchiseur ne se déduisent pas du seul fait de l’existence de difficultés financières rencontrées par le franchisé” et que
“la cessation de paiement des redevances (…) constitue une obligation essentielle du franchisé”, justifiant en cas de non-respect de cette obligation la résiliation du contrat aux torts du franchisé.
En revanche,
“le fait qu’un franchisé ne paye pas ses redevances doit ainsi alerter le franchiseur qui réagira en fonction des circonstances et, notamment, selon que les retards ou défauts de paiement procèdent d’un seul ou de plusieurs franchisés, précise Rémi de Balmann. S
i le défaut de règlement des redevances n’est pas le fait d’un seul franchisé mais de plusieurs d’entre eux, le franchiseur doit éventuellement reconsidérer son business model et se demander si le poids des redevances n’est pas trop important pour les franchisés”.
Le franchiseur peut alors, par exemple, réviser le taux des redevances par voie d’avenants même de manière temporaire le temps que les franchisés retrouvent un meilleur niveau de rentabilité.
Trouver un arrangement
En somme, si le défaut de paiement provient d’un seul franchisé, l’approche doit être faite au cas par cas et le sujet traité différemment selon la loyauté et l’état d’esprit du franchisé, selon Rémi de Balmann.
“Ainsi et face à un franchisé qui – pour des raisons personnelles et conjoncturelles – a des difficultés qui peuvent être surmontées, le franchiseur peut lui consentir un échéancier pour apurer ses impayés voire en reporter le recouvrement, en assortissant le protocole d’accord d’une clause de retour à meilleure fortune, détaille-t-il. Cet accord, bien évidemment, devra être confidentiel, certains franchisés risquant de ne pas admettre cette forme d’assistance et étant tentés d’en demander aussi le bénéfice, même s’ils n’ont pas de problèmes de trésorerie.”
Pour conclure, Rémi de Balmann estime que la réforme du droit des obligations ne pourra pas conduire les juges à s’immiscer dans l’économie du contrat jusqu’à se substituer au franchiseur pour redéterminer les taux des redevances dues par les franchisés.