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Quand le franchiseur gonfle les chiffres… il risque une condamnation personnelle

Le manque de transparence du franchiseur sur les chiffres annoncés engendre la condamnation personnelle de son dirigeant à réparer le préjudice ainsi causé au franchisé (Cour d’appel de Douai 28 mai 2015). Explications par Hubert Bensoussan, avocat au barreau de Paris, membre du Collège des experts de la FFF. Il s’agit ici d’une franchise de brasserie/ friterie, ou prétendue telle. Après que la société franchisée eut exploité le concept pendant quelques mois, son contrat fut résilié pour non-paiement. EIle se retrouva en liquidation judiciaire ; le franchiseur également. Les deux associés du franchisé, cautions, firent alors l’objet de condamnations personnelles à payer au bailleur et au banquier. Ils assignèrent le liquidateur judiciaire et surtout le dirigeant de la société franchiseur pris à titre personnel, pour obtenir l’annulation du contrat et réparation de leur préjudice. En première instance comme en appel, le juge fit droit à leurs demandes. La cour a constaté que les chiffres prévisionnels adressés par le franchiseur au franchisé se sont avérés très élevés par rapport à la réalité, mais surtout que le franchiseur n’a pu donner aucun élément de calcul sérieux sur ces prévisionnels. Sans doute la cour eut elle admis une différence, même élevée, entre les prévisions et la réalité, si les bases de calcul avaient été étayées. Pour elle, “les appelants ne démontrent pas le caractère raisonnable, voire tout simplement réaliste, des résultats prévisionnels qu’ils ont communiqués.” Elle en déduit qu’ils sont dénués de tout caractère sérieux. Elle précise que cela est d’autant plus dommageable que les dirigeants de la société franchisée ne connaissaient rien au métier. Elle retient ainsi un comportement dolosif viciant le consentement, pour annuler le contrat.

Condamnation du franchiseur

Mieux, elle retient la responsabilité personnelle du dirigeant de la franchise sur le fondement de l’article L.223 22 du code de commerce, selon lequel le gérant engage sa responsabilité lorsqu’il commet une faute personnelle. Elle rappelle que cette faute est soumise à trois exigences : elle doit être “intentionnelle, d’une particulière gravité, et incompatible avec l’exercice des fonctions sociales du dirigeant.” Elle note que délibérément le dirigeant a fourni des données comptables fausses en occultant les résultats négatifs qu’il connaissait des autres franchisés du réseau. La faute est qualifiée d’une particulière gravité en ce qu’elle “visait à forcer le consentement de candidats totalement inexpérimentés”. La troisième condition est remplie, selon la cour, en ce que la loyauté et la bonne foi ont totalement manqué du fait du mensonge du franchiseur. Le dirigeant de la société franchiseur est ainsi condamné à réparer l’intégralité du préjudice des deux associés de la société franchisée. Si les faits ainsi exposés et retenus par la cour sont exacts, la décision, sévère, paraît juste. Rappelons qu’il y a quelques années, la cour d’appel d’Aix-en-Provence a condamné un franchiseur à quatre ans d’emprisonnement pour avoir trompé ses franchisés en les ruinant. Heureusement, les gredins sont rares aujourd’hui. La plupart des réseaux de franchise, éclairés par une fédération très présente avec son collège d’experts, par la jurisprudence et aussi par des banques compétentes et pédagogues en la matière, font de l’éthique une valeur de base dans leur fonctionnement. Et puis, rien ne sert de forcer la main à un candidat, un mauvais casting est toujours rapidement coûteux. Le corollaire de l’indépendance voulue pour le franchisé est son implication dans la construction de son point de vente. Il lui appartient d’établir son budget prévisionnel, avec son expert-comptable, à qui le franchiseur remettra des exemples concrets de chiffres réalisés au sein du réseau. La relation est ainsi responsable, transparente ; propice à la réussite et non au vice du consentement.  

Hubert Bensoussan

Hubert           Totalement spécialisé en droit de la franchise, auteur d’un ouvrage ayant contribué à la construction du droit de la franchise, Hubert Bensoussan traite de tous les problèmes stratégiques liés à la franchise : opportunité de créer un réseau, choix du réseau, opportunité d’entamer un procès, choix de la stratégie.

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