Marché relativement jeune en réseau, le courtage en crédit gagne petit à petit ses lettres de noblesse. En pleine structuration, la profession va évoluer et, forcément, susciter des vocations de franchiseurs comme de franchisés.
La franchise, ce n’est pas que la restauration rapide, l’immobilier ou l’hôtellerie. Les secteurs historiques tiennent, il est vrai, le haut de l’affiche en termes de puissance de frappe, mais il ne faut pas oublier ce qui pourrait bien être le futur du commerce organisé et associé. Le courtage en crédit pourrait bien faire partie de ces jeunes pousses en devenir. Selon la dernière étude d’In&Fi Crédits, spécialiste de la recherche de prêts immobiliers, d’assurances et de prêts personnels avec 120 agences en France, 1 200 professionnels sous enseigne en réseau étaient recensés en août 2011, dont 700 étaient organisés sous forme de franchise. “Historiquement, le courtage en crédit existe depuis 1971 via la création du tout premier réseau non-franchisé, explique Patrice Matagne, directeur du développement d’In&Fi Crédits Pro, une des enseignes du groupe GFC, celle-ci spécialiste de la recherche de fonds pour les professionnels (commerçants, PME, etc.). Une grande partie de ce métier était constituée d’indépendants qui évoluaient majoritairement sur le créneau du rachat de crédits et travaillaient de chez eux. In&Fi a été un précurseur en réunissant des entrepreneurs dans un système de franchise en 2003.” Loin d’être une tradition, le commerce organisé ou associé est assez nouveau pour les courtiers en crédit. Est-ce à dire que nous avons affaire à une nouvelle activité ? “Cela va être un nouveau métier en 2012, affirme sans détour Maurice Assouline, président de l’Association professionnelle des intermédiaires en crédits (Apic). La profession est en pleine restructuration via un projet de décret pensé pour favoriser le sérieux des acteurs de ce secteur et mieux informer le client sur ce qu’est réellement un courtier. Ce qui est positif aujourd’hui, c’est que même s’il n’est pas client, le consommateur sait ce que nous faisons. On ne peut pas dire que notre activité est à la mode, mais elle bénéficie en tout cas d’une bonne aura, surtout en pleine crise économique.” Et de proposer une métaphore intéressante : “Lorsque vous êtes malade du pancréas par exemple, vous n’allez pas vous faire soigner par un généraliste, mais bien par un spécialiste. Eh bien pour le courtage, c’est la même chose. Pour moi, les banques sont des généralistes. Lorsque l’on a un besoin bien précis, le courtier est un spécialiste qui trouve des solutions sur-mesure et qui s’occupe vraiment de vous.”
Vive la crise !
Le courtage en crédit a bien été aidé par la crise économique et sociale qui secoue la planète depuis 2009. Pourquoi ? Parce que les banques ont failli et ont réduit leur volume d’octroi de prêts. Les courtiers sont donc apparus de plus en plus comme un vrai recours : “Les consommateurs se sont tournés vers des intermédiaires pour leur trouver des solutions de financement, explique Maurice Assouline, également dirigeant de Cafpi, entreprise spécialisée dans le prêt immobilier depuis 1971. Lorsque l’on va à la rencontre d’un courtier, on a l’espoir qu’il négocie les meilleurs taux. Il y a donc une image positive de ce métier dans le sens où nous sommes considérés comme de vrais partenaires.” Un état de fait qui laisse présager le meilleur pour l’avenir : “Sur le marché français, le courtage affiche aujourd’hui un peu plus de 20 % de taux de pénétration avec une progression constante de 10 % environ chaque année, poursuit-il. Aussi peut-on raisonnablement penser que la nouvelle réglementation de la profession constituera un accélérateur pour le développement du courtage en France.”
Ce que le décret peut changer
Le métier est en train d’évoluer. Dans le bon sens disent ses acteurs. Un décret est d’ailleurs en cours d’élaboration et devrait être adopté en 2012-2013. Mais que va-t-il changer concrètement ? “Il prévoit plus d’exigences pour accéder au métier d’intermédiaire en opération de banques et services de paiement, explique Patrice Matagne. Les entreprises devront également montrer patte blanche pour figurer sur un registre unique des professionnels du secteur via des conditions d’éligibilité bien précises.” Maurice Assouline, président de l’Apic, complète : “Il y aura plus de transparence au niveau du consommateur. Il saura si le courtier est indépendant, franchisé, s’il est mandataire de la filiale d’une banque ou autre. Par ailleurs, il est également prévu que le client fournisse des documents plus précis et complets.” En résumé : “Ce projet de décret va dans le bon sens car il va mettre en valeur les bons courtiers et offrir de meilleures garanties aux consommateurs”, selon le directeur du développement d’In&Fi Crédits Pro.
Franchise ou pas franchise ?
Les réseaux de courtiers en crédit ne sont pas l’apanage du commerce organisé ou associé. Alors pour un candidat à ce métier, que faire ? Choisir d’être indépendant, salarié d’une succursale, ou entrepreneur franchisé ? Pour Patrice Matagne, la réponse est toute trouvée : “L’histoire va dans notre sens, assure-t-il. Les banques apprécient de travailler avec des enseignes installées, notoires, qui développent des outils homogènes et s’assurent d’une harmonisation de la qualité de ses courtiers. Il est bien sûr plus facile pour un établissement bancaire de gérer des relations avec un réseau qu’avec des professionnels isolés disséminés dans toute la France.” Pourtant, il est tout à fait possible d’appartenir à un réseau sans être organisé en franchise. C’est justement le cas de la société Cafpi que dirige Maurice Assouline et qui compte près de 150 cabinets dans l’Hexagone. Pour lui, le choix de ne pas s’organiser avec un contrat de franchise, de licence de marque ou de concession, par exemple, est assumé : “Nous ne voulions pas créer de la richesse sur le dos des franchisés avant que nous n’ayons assis notre image, explique-t-il. De ce fait, il y avait des régions au sein desquelles nous n’étions pas présents, alors nous avons innové en créant un réseau de correspondants avec des tickets d’entrée à 0 euro.” Côté In&Fi, la stratégie est bien sûr différente : “Nous avons des candidats à la franchise qui souhaitent développer l’enseigne In&Fi Crédits (basée sur le particulier) et la licence de marque Pro en plus. Ils ont donc l’opportunité d’avoir une démarche de généraliste et de spécialiste à la fois. Nous pouvons amener quelqu’un qui n’est pas du sérail à devenir un bon courtier pour les particuliers. Mais pour ceux qui se spécialisent dans les professionnels, cela ne demande pas les mêmes compétences. Nous faisons donc grandement attention à la sélection de nos candidats.” Mais au final, réseau franchisé ou non, le fonctionnement est-t-il le même sur le terrain ? “La seule grosse différence, c’est le projet de l’individu. Dans un cas il est salarié de l’enseigne, dans l’autre cas, il est son propre patron et construit pour lui”, conclut Patrice Matagne.
Un avenir radieux ?
Quelle que soit l’organisation de leur entreprise, les deux professionnels s’accordent sur un point : le courtage en crédit est un secteur d’avenir. “L’activité va doubler son chiffre d’affaires et son taux de pénétration dans les cinq ans, prédit Maurice Assouline. La priorité des banques est de trouver de l’épargne donc elles ne peuvent pas faire face aux demandes de particuliers et de professionnels avec tout ce qu’elles ont à faire.” Et le directeur du développement d’In&Fi Crédits Pro d’ajouter : “L’avenir du métier, c’est plus de reconnaissance, l’émergence d’autres réseaux nationaux, un peu comme cela s’est passé pour l’immobilier il y a quelques années.” Souhaitons que le courtage en crédit soit moins exposé aux turbulences économiques que l’est l’immobilier…