La clause de non-concurrence sert à protéger le savoir-faire du franchiseur. Pour qu’elle soit applicable, celui-ci doit apporter la preuve de sa nécessité. Explications de Monique Ben Soussen, avocat à la Cour de Paris.
Difficile, tant pour les professionnels que pour les néophytes, d’avoir une idée claire sur les conditions de validité des clauses de non-concurrence. Celle-ci interdit, tant au cours de l’exécution du contrat qu’à son expiration, à un commerçant de continuer à avoir la même activité dans le même local. La légitimité de cette clause résiderait dans la nécessité de protéger le savoir-faire transmis par le franchiseur. Cette clause est inique et n’a d’autre but que de placer le partenaire dans une situation inextricable où il n’a d’autre choix que de céder son fonds ou de reconduire le contrat. Elle se télescope avec le bail commercial du local : sauf exception, les baux commerciaux n’autorisent qu’une seule activité. Ainsi la mise en jeu de la clause de non-concurrence, cumulée avec les stipulations du bail commercial, aboutit à interdire toute poursuite d’exploitation du fonds. Le franchisé est alors dans une nasse et dispose de peu de solutions pour s’en sortir :
– Tenter de vendre son fonds de commerce sans l’enseigne. Solution envisageable mais moult acquéreurs craindront l’impact du retrait de l’enseigne sur le chiffre d’affaires. Le prix baissera !
– Négocier avec le franchiseur afin que celui-ci fasse reprendre le fonds par un autre partenaire du réseau. Solution alléchante mais le prix est alors laissé à la discrétion du franchiseur.
– Négocier avec le bailleur un changement d’activité. Celui-ci exigera souvent une indemnité pour faire droit à cette demande. De surcroît, les efforts fournis par le commerçant au cours des années d’exécution du contrat seront anéantis. Il devra repartir sur une nouvelle activité, et créer une nouvelle clientèle. Ces trois solutions ont un coût financier élevé.
– Poursuivre sinon la même activité en prenant le risque d’une action judiciaire.
Absence d’indemnité clientèle
La clause de non-concurrence apparaît si injuste à ceux qui y sont soumis que nombre d’entre eux sont persuadés de sa nullité ! La réalité est moins simple. Les tribunaux sont conscients des problèmes engendrés et essaient de limiter son impact. Les juges recherchent si la clause est indispensable à la protection du savoir-faire du franchiseur. La clause ne sera applicable que si le franchiseur apporte cette preuve. Des décisions ont estimé qu’elle n’était pas faite dans le cadre de réseaux de distribution alimentaire dont les méthodes de fonctionnement sont fort proches les uns des autres.
Le second axe de réflexion des juges consiste à rechercher si la clause de non-concurrence est proportionnée à son objet : en clair, est-il indispensable d’interdire au commerçant de poursuivre l’exploitation de son fonds pour protéger les intérêts du distributeur ? Certains juges marquent une certaine répugnance à appliquer ces clauses de façon automatique. La sensibilité du juge sera déterminante dans la façon dont il tranchera ce litige.
Il arrive donc qu’un franchisé en arrive à cesser son activité et voit sa clientèle récupérée par le franchiseur ou un nouveau franchisé. Se pose alors la question de l’indemnisation due au titre de cette clientèle. Les tribunaux la refusent avec constance au franchisé. À l’inverse de l’agent commercial qui œuvre officiellement au développement de la clientèle de son mandant, le franchisé développe celle du franchiseur sans récompense. En l’état actuel du droit, il ne peut rien espérer à ce titre.