Si un temps, les offres de sushis ont inondé le marché français, d’autres enseignes ont vu le jour, depuis quelques années, profitant de l’envie des consommateurs pour le bien manger. Origines et traçabilité sont désormais dans toutes les bouches. Tandis que d’autres marques historiques veulent rajeunir leur clientèle.
On l’a souvent répété dans nos colonnes. Avec la crise, outre le bio qui connaît aujourd’hui une mauvaise passe, le manger sain s’est imposé chez nos concitoyens. La volonté pour ces derniers d’être rassurés sur ce qu’ils ont dans leur assiette. Si la traçabilité s’impose de plus en plus autour de la viande, c’est aussi le cas avec les produits de la mer. Les enseignes spécialisées l’ont bien compris qui mettent en avant l’origine de leurs produits. Chez Taobento, restaurant de sushi, poké bowl et autres plats cuisinés asiatiques, on met en avant un saumon certifié GLOBALG.A.P. qui assure une aquaculture sûre et durable.
“Le manger sain, le healthy n’est plus une tendance, c’est une réalité qui va durer. Les clients souhaitent une nourriture saine, des produits frais, cuisinés le jour même. Chez Taobento, on revendique 90 % de produits frais, nos légumes, nos viandes, nos poissons sont livrés chaque matin, coupés tous les jours par nos équipes, devant nos clients, toutes nos recettes sont cuisinées le jour-même”, explique Ludivine Cappelle, responsable marketing de l’enseigne.
Même engagement au sein de l’enseigne Pokawa qui communique sur une traçabilité labellisé . “Le saumon que l’on utilise vient de Norvège. Nous travaillons via un process précis, appelé pré-rigor, pour nos approvisionnements en saumon. Les filets sont levés directement sur le bateau, il n’y a même pas deux heures entre la pêche et la levée des filets. C’est un vrai gage de qualité. Résultats : il n’y a moins de risque d’avoir des contaminations dans le produit, ce qui est un vrai enjeu pour la restauration de poisson cru”, explique Guillaume Bernard, directeur du développement pour le réseau Pokawa.
Au sein du réseau Léon, dont le premier restaurant a ouvert en 1989 à République (Paris), on met également en avant ce cahier des charges strict qui permet aux consommateurs d’être rassurés. Au sein de la filiale du groupe Bertrand, le produit d’appel reste incontestablement les moules qui représentent 60 % des ventes. “Nous sommes exigeants sur la qualité de la moule, son calibrage, le taux de chair. Grosso modo, 80 moules, c’est un kilo. Cette exigeance complexifie les approvisionnements. Il faut 14 mois pour faire une moule d’autant que c’est une activité saisonnière”, remarque Philippe Hery. Et le directeur général des enseignes Léon et Hippopotamus de poursuivre : “Entre les moules de la mer du Nord, de la Méditerranée ou celles de bouchot, nous réalisons trois tests par semaine au sein de l’enseigne pour suivre la qualité des produits. Il nous arrive régulièrement d’écarter des lots et de revoir notre sélection des mytiliculteurs avec lesquels nous travaillons.”
Qui dit poisson, dit aussi et surtout, la nouvelle tendance du moment : le poke ou poké, c’est selon. L’enseigne la plus emblématique dans ce domaine reste incontestablement Pokawa, marque lancée par Samuel Carré et Maxime Buhler, deux copains globe-trotter qui ont découvert le poké lors d’un voyage. Plat composé d’une base de riz, poisson et légumes, ce dernier a d’ailleurs eu les faveurs du président Emmanuel Macron qui n’a pas hésité à vanter la marque dans un post LinkedIn. Depuis l’ouverture de leur premier restaurant en 2017, la tendance s’est imposée. Même l’enseigne Léon propose aujourd’hui un poke bowl qui représente 4 % des ventes mais que les dirigeants considèrent plutôt comme un plat estival. “Le comptoir poké est également présent chez Taobento et permet à chaque client de personnaliser sa recette. Néanmoins, nous nous méfions des tendances et notre concept a vocation à évoluer sur d’autres recettes d’Asie”, note Ludivine Cappelle pour Taobento.
Un constat également partagé par Kader Jawneh, PDG de l’enseigne Djaam qui propose des bokés africains, déclinaison des poké bowl avec également une grande variété de poissons :
“Le poké répond à la fois au côté sain, et au côté pratique. Il permet de manger chaque jour un plat différent, selon ses envies et ses goûts. C’est une offre assez malléable et qui permet de fidéliser son client. Le poké hawaïen est partout, et même si les gens apprécient, ils se lassent. Le poké ne s’adapte pas forcément à toutes les cuisines. Nous proposons ainsi une alternative africaine aux pokés hawaïens qu’on voit fleurir partout.”
Et si, sur le papier, on pourrait penser que le poké est un produit saisonnier avec son saumon cru, Pokawa nuance cette idée reçue. “L’hiver, nous proposons des bowls chauds qui ont fait de très belles performances. Il est clair que l’on performe peut-être plus l’été mais l’écart entre les saisons n’est pas si important”, insiste Guillaume Bernard.
Avec l’émergence d’Instagram, ces nouvelles enseignes ont su capter une clientèle plus jeune. Un impératif qui colle bien avec ces plats colorés et frais. Côté budget, la marque de fresh food Pokawa investit de son côté 15 000 euros par mois sur Instagram et également 15 000 euros sur TikTok. “Le beau prend aujourd’hui autant (voire plus) de place que le bon, que l’on soit d’accord ou non, on ne peut y échapper. Cela a fait partie de nos réflexions stratégiques bien évidemment. On a encore du chemin à faire mais on évolue dans ce sens. En revanche, la qualité reste toujours notre priorité. Disons qu’avoir des plats instagramables est aujourd’hui un plus pour nous qui pourra nous permettre d’aller toucher une nouvelle clientèle”, remarque Kader Jawneh pour l’enseigne Djaam. Tous, s’ils ont conscience d’appartenir à des enseignes visuelles, ne veulent surtout pas être déceptifs. Ludivine Cappelle pour Taobento ne dit d’ailleurs pas autre chose :
“Si la photo est séduisante mais que la dégustation est décevante, c’est très frustrant pour nos clients. Mais si le client est satisfait, c’est le premier ambassadeur de notre cuisine et donc le premier à diffuser nos recettes sur les réseaux sociaux !”
D’autres enseignes, c’est le cas de Léon, ont pour objectifs, elles, depuis quelques mois, de rajeunir leur clientèle. En septembre dernier, la filiale du groupe Bertrand a ainsi inauguré un nouveau flagship implanté à Paris-Montparnasse. Un peu coincée dans une image vieillissante, l’enseigne a rajeuni son concept, après avoir ôté Bruxelles de son nom. Ce concept de fish brasserie devrait permettre de viser une cible universelle avec moins de segmentation.
“Bien évidemment, les moules frites restent la colonne vertébrale de Léon mais nous souhaitions aussi conquérir une cliente différente, la rajeunir, avec une offre articulée autour du poisson, des fruits de mer ou bien du homard. Il est compliqué d’innover sans rester prisonnier de l’histoire d’une marque”, explique Philippe Hery.
Sur Instagram, l’enseigne recense un peu moins de 6 000 abonnés contre un peu plus de 194 000 pour Pokawa. Le chemin est encore long mais l’enseigne peut assurément compter sur la force du groupe et de ses synergies.