Chaque année, le modèle de la franchise séduit de plus en plus d’entrepreneurs en devenir. Notoriété de l’enseigne, réduction du risque financier, concept éprouvé, accompagnement poussé… Rejoindre un réseau comporte de nombreux avantages. Pour autant, avant de signer votre contrat, il faut se poser les bonnes questions et s’assurer que vous êtes fait pour ce modèle entrepreneurial.
La franchise attire tous les ans toujours plus de candidats. Selon la
16e enquête annuelle de la franchise réalisée par Banque Populaire et la FFF, sur les 31 % des Français qui aimeraient créer leur entreprise, 38 % souhaiteraient le faire via ce modèle.
Les candidats à la franchise mettent en avant plusieurs raisons qui justifient de s’adosser à une marque connue : exploiter un concept éprouvé, bénéficier d’un accompagnement poussé ou encore d’une assistance importante, avoir un risque financier réduit, bénéficier de la notoriété de l’enseigne. “La franchise a ce côté rassurant, admet Laurent Delafontaine, dirigeant fondateur du cabinet Axe Réseaux. Le chef d’entreprise se dit qu’il va copier le succès d’une enseigne qui fonctionne.”
Mais intégrer un réseau n’est pas gage de succès. Votre implication et vos compétences conditionneront votre réussite. “Il faut avoir envie de créer son entreprise avant de se lancer et surtout avoir en tête que même en étant franchisé, on reste entrepreneur indépendant. Même si vous bénéficierez d’un soutien important de la part du réseau”, prévient Florence Soubeyran, responsable Commerce et Franchise chez BPCE.
Esprit entrepreneurial
Dans ce contexte, comment déterminer que vous êtes bien fait pour la franchise et prêt à passer le cap ? D’abord, vous interroger sur votre capacité à être entrepreneur. Surtout si, comme 76 % des franchisés qui se lancent chaque année, vous êtes un ancien salarié. “Pour ces profils, devenir franchisé, c’est changer de monde, indique Sylvain Bartolomeu, dirigeant associé chez Franchise Management. Il faut être en capacité de vivre dans un environnement incertain.” Selon lui, “tout le monde ne peut pas devenir franchisé. Si vous n’avez pas un mental de patron et d’entrepreneur, surtout actuellement, ce n’est pas la peine”.
“Le profil que nous rencontrons le plus souvent reste le cadre d’une quarantaine d’années qui souhaite se mettre à son compte après avoir quitté son entreprise et a bénéficié d’indemnités de rupture. Ce type de candidat peut être alléchant pour les enseignes car ils ont les fonds nécessaires pour se lancer et la maturité professionnelle pour être de bons exploitants”, note Olga Zakharova-Renaud, avocate associé eau sein du cabinet SCP BMGB. Selon elle, “la limite de ces profils reste qu’ils attendent parfois trop du franchiseur et n’ont pas l’esprit de chef d’entreprise. Ils pensent que la tête de réseau va les assister comme s’ils étaient gérant d’une succursale et encore salarié. Un petit nombre d’échecs pourraient être évités s’is avaient conscience qu’ils sont bien des commerçants indépendants, responsables de leur exploitation.”
Si c’est à l’enseigne de vous questionner sur vos attentes et de bien déterminer si votre profil correspond à ce qu’elle recherche, interrogez-vous également sur votre capacité à être autonome, réactif et motivé malgré les coups durs. “Savoir rebondir face aux éventuelles difficultés et ne pas tomber dans la sinistrose est essentiel”, précise ainsi Laurent Delafontaine.
Avant de vous engager avec une enseigne, interrogez-vous aussi sur votre capacité à vous insérer dans un collectif. Car intégrer une franchise c’est travailler pour la réussite du réseau. “Il y a des profils qui sont trop indépendants pour devenir franchisé. Cela peut arriver notamment avec des anciens commerçants qui souhaitent intégrer une enseigne pour gagner en notoriété”, soulève Olga Zakharova-Renaud.
Force d’initiative
Appliquer un concept éprouvé ne signifie pas pour autant que vous ne devez pas faire preuve d’initiatives. La crise de la Covid-19 l’a démontré : toutes les idées venues du terrain et des franchisés peuvent être bonnes. “L’autonomie et l’initiative sont des qualités très recherchées chez les franchisés. Cela peut paraître bizarre, car pendant longtemps les têtes de réseau cherchaient des profils qui appliquent à la lettre le concept”, analyse Pierre Fleury, dirigeant du cabibet PF Marketing. “C’est moins le cas actuellement et la crise que nous vivons l’a prouvé. Les initiatives locales et les propositions des franchisés sont les bienvenues. Les franchiseurs ont lâché un peu la bride et sont plus à l’écoute.”
En effet, il n’a pas été rare de voir émerger des initiatives de la part des franchisés qui ont innové pour pallier le manque de chiffre d’affaires, notamment dans le secteur de la restauration via la mise en place de drive ou de livraison à l’échelle locale. Nombreuses sont les idées à avoir convaincu les têtes de réseaux. Ces dernières n’ont donc pas hésité à tester certains services dans d’autres points de vente.
“L’intelligence collective est importante. Auparavant, les franchisés d’un même réseau échangeaient très peu. Désormais, on s’est rendu compte que si on ne jouait pas collectif et qu’on ne travaillait pas ensemble, cela ne pouvait pas marcher car le savoir-faire évolue en permanence. Les réseaux misent davantage sur la co-construction qui est désormais une composante importante du recrutement de nouveaux franchisés”, estime Sylvain Bartolomeu.
Avant d’intégrer ce type de réseaux, interrogez-vous également sur vos attentes et votre capacité à être impliqué dans l’élaboration du réseau. “Il y a plusieurs types de candidats. D’un côté vous avez les défricheurs qui sont très enthousiastes à faire partie des premiers membres du réseau et qui, malgré la prise de risque plus importante, veulent contribuer à la construction de l’enseigne et du savoir-faire. De l’autre, vous avez les suiveurs qui se sentent plus à l’aise en intégrant un réseau déjà bien établi”, détaille Florence Soubeyran.
Ne pas négliger les compétences managériales
Globalement, les têtes de réseaux cherchent des personnes qui ont la fibre commerciale, une aisance relationnelle et des capacités de gestion. Un triptyque pas toujours simple à dénicher.
“Il faut différencier le franchisé commerçant gestionnaire du franchisé commerçant commercial, prévient Sylvain Bartolomeu. Le premier sera à la tête d’un point de vente de destination où les problématiques principales seront la gestion de stock, des ressources humaines et des flux clients. Ce qui est le cas pour des magasins comme Boulanger ou la restauration. De l’autre, il s’agira d’aller chercher du business pour développer son portefeuille client et d’activité. C’est la typologie de candidats pour les franchises d’amélioration de l’habitat, telle que Tryba.”
En fonction du secteur d’activité, le nombre de salariés variera aussi. Il est alors nécessaire de posséder des compétences managériales pour réussir en tant que chef d’entreprise franchisé. “C’est pour cela que les anciens cadres qui ont géré des équipes sont appréciés des enseignes. Car une chose est certaine, manager cela ne s’improvise pas”, affirme Pierre Fleury.
Une capacité financière suffisante
Enfin, intégrer une franchise passe aussi par votre assise financière. En fonction de votre apport et de votre capacité d’endettement, certains secteurs seront pour vous inaccessibles. Il est donc important de ne pas avoir les yeux plus gros que le ventre et d’investir de manière raisonnable, dans un réseau et un concept à votre portée.
“L’apport est le critère de qualification des contacts. Mais cela ne doit pas être un critère de recrutement. Surtout que de plus en plus les enseignes développent des mécanismes plus souples pour permettre à des profils qui n’ont pas encore les moyens financiers de s’installer”, prévient Sylvain Bartolomeu. Olga Zakharova-Renaud confirme : “Si le profil colle à ce que recherche l’enseigne mais que seul le financement pêche, il y a toujours des solutions à trouver. Le recrutement ne doit pas se faire que sur le critère financier et les enseignes l’ont bien compris.” En effet, de plus en plus proposent des contrats de location gérance qui permettent aux candidats de s’installer avec un investissement moindre, de se constituer un apport pour racheter ensuite le fonds de commerce et devenir franchisé.
D’autres proposent de prendre une participation temporaire dans l’entreprise afin d’accélérer l’installation. “Mais il faut avoir une assise financière suffisamment importante pour ne pas être dans le stress et conserver un minimum de sécurité”, insiste Sylvain Bartolomeu. Surtout en ces temps de crise où les banques peuvent être un peu frileuses. “Notre rôle est d’accompagner ce qui nous semble être des réussites. La crise n’a pas changé notre métier. Mais l’environnement économique a évolué, et il faut en tenir compte”, conclut Florence Soubeyran.