Selon la 17e enquête de la Franchise réalisée par la Fédération française de la franchise et Banque Populaire (septembre 2020), 84 % des franchisés ont souscrit un emprunt bancaire pour financer la création de leur entreprise. Encore faut-il obtenir le fameux prêt ! Voici 6 conseils pour convaincre les banques.
1/ Faire jouer la concurrence
Lorsqu’il s’agit d’obtenir un prêt pour monter une entreprise, les primo-entrepreneurs (dont font partie les primo-franchisés) peuvent commettre une erreur : interroger uniquement leur banque historique. Or, c’est une erreur qui peut se montrer fatale.
“Interroger une seule banque en pensant que ce sera facile parce qu’on a déjà discuté du projet avec son banquier et qu’il s’est montré intéressé est une illusion. Ce ne sera pas son banquier qui donnera son feu vert ou non mais un service dédié. Et il sera ensuite beaucoup plus difficile d’obtenir un prêt auprès d’un autre établissement si la réponse est négative”, met en garde Sylvain Bartolomeu, dirigeant associé de Franchise Management.
D’autant plus que le franchisé risque de se montrer découragé par ce refus, ayant tout misé sur sa banque… Alors que la réponse négative est peut-être uniquement due au fait que la banque sollicitée ne travaille pas avec les réseaux ou pas avec le secteur du franchisé. Ou que ce n’est pas le moment de l’interroger : en effet, les établissements bancaires mettent à certaines périodes l’accent sur telle ou telle opération, délaissant les autres. Interroger plusieurs banques permet aussi de s’assurer d’obtenir les meilleures conditions disponibles sur le marché : on compare les différentes conditions et surtout on met en concurrence pour négocier les taux, frais de dossier et autres services. Pour éviter de multiplier les rendez-vous avec différents établissements, il est possible de s’adresser à un courtier qui simplifiera la procédure.
“Les courtiers organisent une réunion lors de laquelle le porteur de projet peut présenter son projet à l’ensemble des banques pressenties. Cela permet de ne faire qu’une seule réunion pour expliquer son projet et ses besoins en financement”, raconte Stéphanie Di Fusco, directeur national marché franchise au sein du groupe InExtenso.
Certains courtiers, digitaux ou même “phygitaux” proposent de déposer facilement le dossier en ligne et de faire ensuite les rendez-vous en présentiel. De quoi gagner du temps !
2/ Mettre en avant l’enseigne choisie
Interroger uniquement sa banque historique c’est également passer à côté d’éventuels partenariats que l’enseigne choisie a pu nouer avec des établissements. Florence Soubeyran, responsable marchés commerce et franchise au sein de la Banque Populaire, conseille aux futurs franchisés de s’intéresser à ces partenariats bancaires.
“Des informations sur l’enseigne ont pu être fournies aux banques partenaires et cela facilite les démarches”, indique-t-elle. En effet, les franchisés omettent souvent de mettre en avant l’enseigne qu’ils comptent rejoindre et ses chiffres clés. Grave erreur : le réseau envisagé fait pleinement partie du projet.
“Les banques ont besoin de connaître l’enseigne en plus du projet et du porteur de projet, estime Benoît Fougerais, directeur général du réseau Prêt Pro. Il y a de plus beaucoup de points positifs à souligner lorsqu’on se lance avec un franchiseur, cela rassure les banques”.
Ce serait donc dommage de se priver d’un argument en faveur de son dossier en ne parlant pas de son enseigne ! Selon la 17e enquête de la Franchise réalisée par la Fédération française de la franchise et Banque Populaire (septembre 2020), 62 % des franchisés estiment que présenter un dossier en franchise a joué en leur faveur dans l’obtention de leur financement bancaire, et particulièrement dans le secteur du commerce (67 % vs. 54 % dans les services). En plus de données chiffrées soulignant la réussite du réseau, ne pas hésiter à mettre en avant des éléments plus qualitatifs comme le concept ou encore l’histoire de la marque.
“Il est intéressant de mettre en avant ce que l’enseigne va apporter en complémentarité de ses propres forces et faiblesses”, souligne Florence Soubeyran.
Cette dernière donnant l’exemple d’un ancien banquier qui est à l’aise avec le pilotage financier et choisit une enseigne qui répond pleinement à ses besoins d’accompagnement en matière de marketing et communication sur les réseaux sociaux. La responsable marchés commerce et franchise de la Banque Populaire invite aussi à mettre en avant les rencontres avec les franchisés du réseau et les éléments que ces échanges ont apporté.
“Cela montre la construction du projet”, indique-t-elle.
3/ Faire rêver sans être un rêveur
Si la présentation de l’enseigne ne doit pas se limiter à des chiffres, cela est également vrai pour le reste du dossier, notamment concernant le projet à financer. Stéphanie Di Fusco souligne l’importance de raconter une histoire.
“L’histoire du projet doit mettre en avant la dimension humaine : les postes créés, l’attrait de cette nouvelle offre pour le client final., etc. Ce n’est pas sur des chiffres que la décision sera prise, met-elle en avant.
Le dossier ne doit pas se résumer à des fichiers Excel mais être attrayant, offrir les bonnes clés de lecture pour que le banquier puisse prendre sa décision.” Elle insiste notamment sur la dimension humaine :
“L’histoire du projet doit mettre en avant les postes créés, l’attrait de cette nouvelle offre pour le client final”, énumère-t-elle. Pour Florence Soubeyran, cette histoire doit avant tout faire preuve de cohérence pour pouvoir être audible pour les banquiers :
“Il doit exister une cohérence entre le parcours de la personne et le projet. Il s’agit de prendre dans son histoire et son parcours professionnel les éléments qui structurent ce projet de création en franchise : même si on change de secteurs ou de métiers, il existe toujours des éléments pertinents de ses expériences précédentes à mettre en avant comme le goût pour la relation avec les clients ou encore une compétence de chef de projet ou de gestion budgétaire”, explique-t-elle.
Le franchisé se raconte, raconte son projet mais en gardant en tête qu’il est désormais un chef d’entreprise et qu’il doit faire preuve du sérieux attendu par les partenaires financiers. Il s’agit de faire rêver sans être un rêveur. Ainsi, Sylvain Bartolomeu ne parle pas d’ “histoire” mais de “scénario” : il invite à présenter aux banquiers plusieurs scénarios possibles du projet, correspondant à plusieurs prévisionnels afin de lever les freins quant au caractère incertain du business dans la situation actuelle. En effet, montrer qu’on a pensé à toutes les éventualités est rassurant et démontre en même temps le sérieux de la démarche.
4/ Bien structurer son dossier
L’histoire que l’on raconte doit en effet être mûrement réfléchie et se construire autour de cinq grandes parties, bien étayées : le porteur de projet, le projet, la marque, l’emplacement et la concurrence. Le tout agrémenté de graphiques et d’images afin de privilégier l’aspect visuel et pas uniquement le contenu. Il faut donc prendre le temps de préparer son dossier avec sérieux. “C’est une perte de temps pour la banque et pour le porteur de projet d’interroger un établissement bancaire sans dossier complet”, juge Benoît Fougerais. Il est rejoint sur ce point par Sylvain Bartolomeu qui conseille de bien monter son dossier :
“Il faut être rigoureux et apporter des données tangibles, notamment sur la manière dont le réseau a résisté à la crise. Les banques sont en ce moment très regardantes, il ne faut pas y aller en dilettante”.
Il serait dommage de ne pas obtenir de financements parce que le dossier n’était pas assez complet. Ainsi, Florence Soubeyran recommande de compléter l’état local du marché fourni par le franchiseur avec une réelle étude de marché qui analyse la concurrence, les flux autour de l’emplacement, le poids des différentes catégories socio-professionnelles, le potentiel commercial de la zone, etc. De quoi montrer le sérieux du projet mais aussi du porteur de projet. Ce dernier doit aussi être présenté longuement, CV à l’appui : c’est en effet l’entrepreneur qui est le garant du succès du projet. La responsable marchés commerce et franchise de la Banque Populaire insiste aussi sur l’honnêteté avec laquelle le dossier doit être rédigé :
“Il est important de faire preuve de transparence : on peut avoir rencontré des aléas dans son parcours mais il est vraiment préférable d’en parler spontanément et d’expliquer ce qui s’est passé”, souligne-t-elle.
Il ne faudrait pas en effet que le banquier interrogé découvre dans le parcours du franchisé un dépôt de bilan, par exemple : il se retrouverait seul face à l’information, sans explication pour la comprendre et avec le sentiment d’avoir été trahi. Pour sûr, le prêt ne serait alors pas accordé.
5/ Préparer son pitch
Pour convaincre les banquiers, si un bon dossier, bien complet est nécessaire, il ne suffit pas. Il faut aussi savoir bien le présenter. Sylvain Bartolomeu parle de “posture d’entrepreneur” : “Il faut savoir défendre son dossier auprès de la banque, être en mode combat et non pas en mode confort”, insiste-t-il. Pour cela, Stéphanie Di Fusco invite à bien préparer son pitch afin d’être sûr de soi, d’être percutant, de choisir les bons mots… Bref d’être à l’aise avec son discours à l’oral. Et d’ainsi réussir à convaincre ! Stéphanie Di Fusco recommande aussi d’anticiper les questions qui pourront être posées par les banquiers afin de préparer les réponses à apporter. Bien sûr, cet exercice de défense orale de son dossier n’est pas évident pour tout le monde. Mais pas de panique, le pitch peut être rôdé auprès d’organismes d’accompagnement des entrepreneurs : en effet, pour obtenir un prêt d’honneur, il faut constituer un dossier et souvent le présenter devant un jury. De quoi s’entraîner mais aussi de marquer des points auprès de son banquier, en montrant sa motivation à mener à bien son projet.
“Le banquier peut apprécier la démarche : cela crédibilise et consolide la démarche du créateur. D’autant plus que ces organismes ne se résument pas à une aide financière (le prêt d’honneur) mais ont accompagné le créateur d’entreprise dans la construction de son projet”, remarque Florence Soubeyran.
Ce serait dommage, en effet, de se passer de cette aide précieuse.
6/ Se faire accompagner
Les organismes d’accompagnement des entrepreneurs ne sont pas les seuls à proposer de l’aide pour bien préparer son dossier à déposer auprès des banques et bien le pitcher. Nous avons parlé plus haut des courtiers : son rôle ne se limite pas à mettre l’entrepreneur en relation avec des banques ; il peut aussi apporter une aide précieuse dans la préparation du dossier afin qu’il corresponde au mieux aux attentes des banquiers. C’est en effet son métier de dialoguer avec des banquiers et de leur présenter des dossiers de demande de financement : son expertise est donc réelle et il serait regrettable de ne pas en profiter.
“Le courtier va mettre de l’huile dans les rouages”, résume Benoît Fougerais.
Mais le partenaire le plus à même d’épauler les franchisés dans cette étape est bien évidemment le franchiseur. Il peut tout d’abord fournir des données de qualité aux établissements bancaires sollicités, sur le réseau mais également sur le marché local. Mais ce n’est pas tout !
“Des franchiseurs donnent des clés pour monter le dossier”, rapporte Sylvain Bartolomeu qui incite à aller interroger la tête de réseau sur des modèles types de dossier. Bien sûr, se faire accompagner par son expert-comptable sur ce point est essentiel. De même, si le franchisé n’en n’a pas encore un d’attitré, il peut se faire guider par celui de l’enseigne. L’accompagnement de la tête de réseau démarre dès la demande de financement. Et si ce dernier n’est pas en mesure d’apporter cette aide, mieux vaut passer son chemin : cela ne présage rien de bon pour la suite.