Porté par les reprises de chantiers immobiliers, le secteur de la cuisine est reparti à la hausse depuis la fin de l’année 2015. Mais ce marché reste assez concurrentiel pour les enseignes qui, pour se démarquer, misent sur des innovations produits mais également sur des services adaptés à leur clientèle.
Le marché de la cuisine a repris des couleurs depuis fin 2015. Selon les chiffres dévoilés par l’Institut de prospective et d’études de l’ameublement (lpéa), sur les quatre premiers mois de l’année, le secteur connaît une croissance de plus de 6 %. “Cela s’inscrit dans un contexte où le marché de l’ameublement se porte beaucoup mieux depuis 2015, souligne Catherine Rouyer Durand, consultante au sein de l’Ipéa, spécialiste cuisine. L’année dernière, le chiffre d’affaires du secteur du meuble a atteint 9,34 milliards d’euros, soit une évolution de 2,4 % par rapport à 2014. Une bonne santé qui se confirme puisque fin avril, la croissance cumulée, est de 5,8 %.” Dans le même temps, les meubles de cuisine ont vu leurs ventes progresser avec une augmentation, en valeur, de 3,8 %. “Le segment pèse ainsi 2,38 milliards d’euros du marché de l’ameublement. C’est un secteur très dynamique, porté notamment par l’effet de renouvellement”, indique Catherine Rouyer Durand. Cette dynamique a permis aux enseignes de limiter la casse pendant ces trois dernières années où la crise a été moins subie par les cuisinistes que d’autres acteurs du meuble, selon la consultante de l’Ipéa. “Jusqu’en 2013, nous avions une croissance annuelle située entre 2 % et 3 %. Les trois années qui viennent de s’écouler ont, en revanche, montré un marché stagnant ou en récession, assure toutefois Luc Brossard, directeur de l’enseigne Perene. Aujourd’hui, ce phénomène est encore loin d’être achevé puisque d’après Jean-Thierry Catrice, directeur de Schmidt Groupe (enseignes Schmidt et Cuisinella), “il reste encore de nombreux ménages français qui ne sont pas dotés d’une cuisine équipée. De ce fait, cela va encore booster le marché.” En effet, selon l’Ipéa, actuellement 28 millions de ménages auraient une cuisine équipée à leur domicile. “Ce qui fait encore plus de 11 millions de foyers à investir. Sans oublier les résidences secondaires, qui sont très nombreuses en France. L’Hexagone reste vraiment un des marchés les plus porteurs en Europe pour les cuisinistes”, assure Catherine Rouyer Durand.
Une des pièces maitresses de la maison
Surtout que d’année en année, la cuisine est devenue une pièce primordiale pour les Français. Nombreux sont les consommateurs à abandonner leur micro-ondes et leurs surgelés au profit de la cuisine maison. “Cette tendance a été notamment boostée, ces dernières années, par les émissions culinaires qui ont redonné l’envie de cuisiner aux Français”, souligne Luc Brossard. Autre tendance : le budget. Les consommateurs n’hésitent pas à mettre la main à la poche pour embellir leur intérieur et donc leur cuisine. “Les Français ne rêvent que d’une chose, vivre bien chez eux et équiper leur maison correctement. Ils ont vraiment la volonté d’avoir une ambiance cocooning”, indique Jean-Thierry Catrice. Surtout, la cuisine est devenue un meuble design à part entière, que le consommateur souhaite intégrer le plus possible dans son espace de vie. D’où l’augmentation du nombre de cuisines ouvertes dans les foyers et l’affection des consommateurs pour le sur-mesure. “65 % de nos cuisines sont ouvertes sur le séjour, indique Philippe Croset, directeur général de l’enseigne Mobalpa. Cela nécessite une personnalisation pour chaque client. En effet, le consommateur veut du fonctionnel et du technique quand il est dans sa cuisine mais il souhaite que la pièce se fonde dans le décor quand il est dans son salon.” Ce constat, d’autres enseignes, plus haut-de-gamme, le font également. Comme chez Perene, où Luc Brossard estime que “le consommateur ne veut pas la même cuisine que son voisin. Il souhaite donc quelque chose de personnalisé et qui s’adapte parfaitement à son intérieur.” Avec les années, cette tendance du sur-mesure et notamment de la cuisine ouverte ne fera que s’accentuer. D’après Catherine Rouyer Durand, les ventes d’îlot central présent en majorité dans des cuisines ouvertes sur le séjour, représentaient 1 % à 2 % du marché il y a sept ans. “Aujourd’hui, 12 % des cuisines en sont équipées. Il y a à la fois la demande des consommateurs, notamment des plus jeunes, mais aussi celles des promoteurs immobiliers qui misent sur ce type de cuisines pour gagner des mètres carrés”, insiste la consultante de l’Ipéa.
Un marché porté par l’immobilier
Et si le segment de la cuisine repart à la hausse, c’est notamment parce qu’il y a eu une reprise des chantiers immobiliers. Selon les chiffres du ministère du Logement, publié en mai dernier, le nombre d’habitations autorisées à la construction avait, fin avril 2016, augmenté de 7,4 % par rapport aux douze derniers mois (chiffre en données brutes cumulées). Le nombre de logements commencés, quant à lui, avait crû de 3,8 %1. Mais il n’y a pas que les logements neufs qui sont concernés. “En 2015, nous avons constaté une hausse des transactions dans les logements anciens de plus de 12 %”, assure Catherine Rouyer Durand. Il y a donc tout un pan du marché qui se fait sur le renouvellement des cuisines déjà existantes. Même si les Français font partie de ceux qui rénovent le moins souvent cette pièce. “Tous les 23 ans en moyenne, ce qui est très peu, concède la consultante de l’Ipéa. Dans les pays nordiques ils changent leur cuisine tous les 8 ans et en Allemagne tous les 12 ans. Pas étonnant donc que les Français font davantage appel à des grandes enseignes (Mobalpa, Cuisinella, Ixina) car ils veulent des spécialistes et du service.”
La recherche du service
Dans ce contexte, le secteur des meubles de cuisine reste très concurrentiel. Une dizaine d’enseignes se disputent le marché et doivent donc innover pour continuer à capter davantage de clientèle. Des innovations qui portent tant sur les produits que sur les services apportés aux consommateurs. “C’est en partie ce qui explique le changement de comportement des consommateurs qui se tournent davantage vers des enseignes de marque plus que vers des commerçants indépendants”, assure Jean-Thierry Catrice. Même constat pour le dirigeant de l’enseigne Mobalpa, Philippe Croset, qui estime que “la cuisine reste un achat très cartésien et fonctionnel : le consommateur a besoin de rangement et de cuisiner pratique. Donc c’est notre rôle d’apporter plus de fonctions produits et de capacités de rangement”, assure-t-il. Côté service, les enseignes innovent en améliorant leur service-client et la prise en charge des potentiels problèmes relatifs aux produits. Que ce soit chez Perene, Schmidt Group et Mobalpa, les dirigeants des marques proposent des garanties plus longues afin de répondre davantage aux besoins des consommateurs. “Nous sommes passés de 5 à 10 ans pour les meubles et à 7 ans pour l’électroménager (contre deux ans auparavant), indique Philippe Croset. Cette partie du service est primordiale pour les consommateurs et c’est également pour cela que nous lançons une nouvelle plate-forme téléphonique, basée en France, avec un numéro unique.”
1 : Chiffres divulgués par le ministère du Logement en mai 2016. Les autorisations à construire des logements individuels ont augmenté de 3,7 %. Le nombre de logements collectifs autorisés, y compris en résidences, augmente de 10 % (chiffres calculés par rapport au cumul des douze mois précédents).
Un univers qui ne peine pas à recruter des franchisés
Dans ce contexte de reprise, les enseignes n’ont pas grande difficulté à convaincre les franchisés de rejoindre leur réseau. Puissance de l’enseigne, image de la marque ou cible de la clientèle, il y a plusieurs aspects qui vont inciter le candidat à intégrer une enseigne plutôt qu’une autre. “Chez Mobalpa, nous essayons de mettre en avant tout ce qui permettra à un futur franchisé de réussir chez nous, indique Philippe Croset. On va donc l’accompagner dans sa réflexion et l’élaboration d’un business plan notamment.” Ainsi, la marque qui compte déjà 245 points de vente, envisage d’inaugurer une quinzaine de magasins cette année. De son côté, Schmidt Groupe (710 boutiques) assure ouvrir un point de vente par semaine. “Bien sûr, nous avons des fermetures dues à des zones commerciales qui périclitent, mais nous espérons atteindre les 740 magasins d’ici à la fin de l’année avec une quinzaine d’ouvertures sur l’enseigne Cuisinella et une vingtaine sur Schmidt”, détaille Jean-Thierry Catrice, directeur de l’enseigne. Enfin, pour Luc Brossard, directeur de la marque Perene, le marché de la cuisine reste un secteur d’activité valorisant. “Notamment parce que son positionnement se rapproche de l’agencement d’intérieur et qu’il y a une démarche d’architecture d’intérieure, surtout chez Perene, assure-t-il. Donc forcément, cela peut convenir à des porteurs de projet attirés naturellement par ces thématiques.” Actuellement, l’enseigne compte une centaine de magasins et a pour objectif d’inaugurer une douzaine de points de vente supplémentaires d’ici à la fin de l’année.