L’Insee vient de publier exceptionnellement une enquête sur la conjoncture économique de mars directement liée à la crise sanitaire qui touche actuellement la France. Le climat des affaires accuse brutalement le coup à des niveaux inégalés depuis 1980.
Crise du coronavirus oblige, l’Insee a livré ce matin une première enquête sur le climat des affaires en France sur ce mois de mars en cours. D’ores et déjà, l’Institut national de la statistique et des études économiques révèle que le climat des affaires perd près de dix points, à 95.
“Il s’agit de la plus forte baisse mensuelle de l’indicateur depuis le début de la série (1980). En octobre 2008, après la faillite de Lehman Brothers, l’indicateur avait chuté de 9 points”, pointe l’étude. Avant de poursuivre :
“Au niveau sectoriel, les indicateurs de climat des affaires se dégradent considérablement dans les services (-14 points) et dans le commerce de détail (-13 points). Ils se détériorent également dans le commerce de gros (-5 points) et dans l’industrie (-3 points).”
Certains secteurs plus impactés que d’autres
L’Insee dresse ensuite un tableau au cas par cas selon les branches d’activités. Les activités agricoles et l’industrie agro-alimentaire seraient sans doute moins affectées que les autres secteurs. L’Institut table sur une perte d’activité de – 52 % dans le reste de l’industrie, pas moins de – 89 % dans le secteur de la construction, – 36 % dans les services marchands.
“Parmi les services marchands, certaines branches sont très sévèrement touchées (transports, hôtellerie, restauration, loisirs, etc.)”, poursuit l’Insee.
Consommation des ménages en berne
En conséquence, l’Institut estime que la consommation des ménages serait inférieure de 35 % à sa ‘normale’. Un net repli qui s’explique notamment par l’effondrement de la consommation de nombreux biens de l’industrie manufacturière (- 60 %).
“Certaines dépenses de consommation se sont réduites au minimum, entre – 100 % et – 90 % (matériel de transport, textile, habillement)”, remarque l’Insee. Et l’organisme de poursuivre son analyse :
“La consommation de services marchands a également diminué, d’environ 33 %, contribuant à la baisse totale de la consommation à hauteur de 15 points. […] La consommation de services non marchands baisserait de 34 %, contribuant à hauteur de 2 points à la baisse d’ensemble. Du fait de la suspension des travaux de rénovation, la consommation des ménages dans la branche de la construction baisserait de 90 %, contribuant à une baisse de 1 point de la consommation totale des ménages.” Sans surprise, en face de pareille crise, la consommation des ménages en produits agricoles et agro-alimentaires serait en hausse de 6 %.
Effondrement du PIB
Si l’Insee se garde bien de déduire des prévisions trimestrielles ou annuelles d’évolution du PIB français, l’Institut estime qu’un mois de confinement correspondrait à 12 points de PIB trimestriel, soit 3 points de PIB annuel. Une prévision qui doublera évidemment si le confinement est deux fois plus long.
Bien entendu, pour la suite, tout dépendra du scénario de sortie de crise. Il faudra également être attentif aux mesures de soutien aux ménages et aux entreprises. Quoiqu’il en soit, le retour à la normal ne se fera certainement pas de manière immédiate. “
L’Insee tentera, dans les prochaines semaines et si possible d’ici une quinzaine de jours, d’examiner comment évoluent ces estimations et d’apporter des éclairages sur la situation conjoncturelle de la France”, remarque l’Institut.
Dans une récente interview, Yannick L’Horty, Professeur d’économie à l’université Gustave Eiffel, et directeur de la Fédération Théorie et Évaluation des Politiques Publiques (TEPP) du CNRS, nous expliquait qu’avec l’épidémie de coronavirus, le confinement des Français et le ralentissement de l’économie,
le PIB risquait de baisser largement, entre – 2 et – 6 points en un an. La première estimation de l’Insee vient donc confirmer ses propos.