Ce n’est pas parce qu’une enseigne est étrangère qu’elle déroge au droit français quand elle contractualise avec un franchisé sur le territoire national. Pour cette raison, la majorité des réseaux non-français proposent des contrats nationaux. Quand ce n’est pas le cas, le respect de la loi Doubin n’en est pas moins de mise. Une grande vigilance est donc nécessaire.
Non, les franchisés sous enseignes internationales qui ont signé un contrat de franchise français ne sont pas un tas d’irréductible Gaulois. Ils sont la norme.
“Les franchiseurs ‘normaux’ adaptent leur contrat aux exigences du droit français en prenant conseil auprès d’un spécialiste en droit français qui permet des aménagements pour que leurs documents ne soient pas en contradiction avec les règles du pays”, indique Olga Zakharova-Renaud, avocat associé au cabinet BMGB Associés. À partir du moment où le contrat est exercé sur le sol français, les dispositions du Document d’information précontractuelle concernant la loi Doubin, qui est d’ordre public économique, doivent être respectés, et ce même si le futur contrat est soumis à un droit étranger.
“Il existe des jurisprudences en la matière. Par exemple le 25 octobre 2011, c’est paru dans la Revue du droit commercial, la décision dit que l’article L330-3 du code du commerce [voir encadré]sur la disposition de la loi Doubin concernant l’information précontractuelle constitue une loi de police applicable, alors que le contrat était soumis à la loi québécoise.”
Pour cette raison, même pour les enseignes internationales, il est préférable de proposer un contrat français en vue de les adapter au contexte national, un choix qui a été fait, par exemple, par les grandes chaînes de restauration rapide.
“Les enseignes qui ne veulent pas le faire sont rares et marginales. Quand cela arrive, on en vient à se demander pourquoi !, poursuit Olga Zakharova-Renaud.
C’est extrêmement suspect. Pour moi, le seul but, c’est d’empêcher les franchisés de faire un procès contre la tête du réseau.” En effet, le procédé est plutôt dissuasif. Car pour ce faire, le franchisé devra payer les conseils d’un avocat français et d’un autre compétent dans le droit concerné. Il faut également traduire tous les textes en langue étrangère.
Choix en connaissance de cause
Sans même envisager d’éventuelles difficultés à venir, avoir à signer un contrat étranger est en soi un problème pour un candidat à la franchise car il sera difficile de savoir ce qui, dans ce contrat, est légal du point de vue même du pays d’origine. Ainsi, tous les points devront être soumis à la vigilance de l’entrepreneur.
“Il ne pourra pas se faire conseiller pour savoir si le contrat est conforme ou pas avec le droit. Or, il est censé s’engager en toute connaissance de cause. Le franchiseur peut prévoir des clauses non licites de façon non volontaire. La seule solution reste de trouver un avocat doublement spécialiste en droit étranger et en droit de la distribution.” La première chose à faire si l’on vous propose un contrat étranger, c’est donc d’essayer de demander son adaptation au droit français.
Si jamais ce n’était pas possible, il faut savoir que les contrats étrangers ne peuvent pas non plus faire dérogation aux dispositions du droit des procédures collectives.
“En cas de mise en redressement ou liquidation judiciaire de la société franchisée, pour que le contrat soit résilié, c’est le mandataire judiciaire qui en décide, même si ce document est soumis à une loi étrangère, précise l’avocate. Cela fait aussi partie du droit d’ordre public.”
Avantage concurrentiel
Autre problème lié au fait d’appartenir à un réseau étranger : la question de l’application du concept au marché français et aux consommateurs français. Il faut y faire attention.
“Des problèmes peuvent se rencontrer quand il n’y a pas de master-franchisé ou de filiale française de l’enseigne en question. C’est arrivé par exemple avec une marque de prêt-à-porter hollandaise. Les franchisés étaient déjà engagés quand ils ont reçu des collections qui étaient en décalage complet avec les tendances françaises.” D’un point de vue du droit, il n’y a pas vraiment de solution. Selon l’avocate, il faut se battre. Or, si le contrat est étranger, pour les raisons évoquées ci-dessus, il sera difficile d’obtenir gain de cause alors que le franchiseur a l’obligation de faire en sorte que le concept corresponde au pays où s’exerce le contrat et offre un avantage concurrentiel au franchisé. La présence d’un master-franchisé ou d’une filiale sur place permet de mieux s’adapter, car il sert d’interlocuteur et de relais, mais alors il faut payer plus cher car ce master-franchisé doit reverser une partie des redevances à l’enseigne étrangère.