Lors de la signature d’un contrat de franchise, le futur franchisé se penche rarement sur les clauses applicables après la cessation du contrat. La période post-contractuelle paraît alors lointaine, et les litiges avec le franchiseur inenvisageables… Pourtant, les clauses ayant vocation à s’appliquer après l’expiration du contrat sont lourdes de conséquences. Une tribune de Sophie Bienenstock, avocate au Barreau de Paris, BSM Avocats.
Les contrats de franchise contiennent fréquemment des clauses post-contractuelles ayant pour objet de protéger le savoir-faire du franchiseur… et ayant pour effet de restreindre, à des degrés variables, la liberté d’entreprendre du franchisé. Parmi ces clauses figure l’obligation de non-concurrence, qui consiste à interdire au franchisé de poursuivre une activité concurrente après la fin des relations contractuelles. La clause de non-affiliation pour sa part interdit à l’ancien franchisé de s’affilier à un réseau concurrent, mais le laisse libre de poursuivre la même activité de façon indépendante.
Les clauses de non-affiliation, bien que moins attentatoires à la liberté d’entreprendre du franchisé, sont soumises par la jurisprudence (et depuis 2015 par le législateur) aux mêmes conditions de validité que les clauses de non-concurrence. Si ces clauses visent théoriquement à protéger le savoir-faire du franchiseur, elles permettent surtout à ce dernier de se prémunir contre les concurrents les plus redoutables, à savoir les anciens membres de son réseau.
Dans le sillage du droit européen, la jurisprudence a longtemps subordonné la validité de ces clauses à une série de conditions. Les clauses devaient être limitées dans le temps et dans l’espace et “être nécessaires à la protection du savoir-faire du franchiseur”. Les tribunaux appréciaient au cas par cas la portée, tant géographique que temporelle, de la clause litigieuse pour statuer sur sa validité. L’absence de critère objectif a conduit à une jurisprudence erratique et à une insécurité juridique regrettable. La loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques du 6 août 2015 (dite loi Macron) a sur ce point apporté des précisions appréciables.
Clarification
Selon le nouvel article L.341-2 du Code de commerce, toute clause ayant pour effet de restreindre la liberté d’exercice aux termes de la relation contractuelle avec la tête du réseau est soumise aux conditions de validité suivantes :
– Elle doit porter uniquement sur les locaux à partir desquels l’exploitant exerce son activité pendant la durée du contrat ;
– Elle doit être indispensable à la protection du savoir-faire substantiel, spécifique et secret transmis dans le cadre du contrat ;
– Sa durée doit être limitée à un an après l’échéance ou la résiliation du contrat.
Au-delà d’une clarification devenue indispensable des conditions de validité des clauses de non-concurrence, le nouvel article L.341-2 du Code de commerce a aussi le mérite de limiter la portée des clauses post-contractuelles à un an et aux locaux à partir desquels le franchisé exerçait son activité. S’il s’agit incontestablement d’une avancée pour les franchisés, on peut toutefois regretter que le législateur ne soit pas allé jusqu’à interdire purement et simplement ces clauses attentatoires à la liberté d’entreprendre. Limiter l’obligation de non-concurrence à une année est parfaitement inutile : qu’est donc censé faire l’ancien franchisé avec son fonds de commerce pendant l’année suivant la fin du contrat ?
Par ailleurs, la loi ne donne strictement aucune indication pour apprécier le caractère “indispensable à la protection du savoir-faire substantiel, spécifique et secret transmis dans le cadre du contrat”. Il reviendra aux juges de statuer au cas par cas.
Enfin, la loi Macron ne précise pas les sanctions applicables en cas de non-respect des conditions susmentionnées. Nous manquons encore de recul à ce jour sur l’application de cette disposition légale par les tribunaux. Nous ne pouvons qu’espérer que les juges continueront à déclarer la clause nulle et à la priver de tout effet.