L’institution européenne soupçonne la plate-forme de se servir des données de ses vendeurs tiers à son propre profit. Le géant américain risque d’être lourdement condamné.
L’enquête avait débuté en 2015. Dans un premier temps, sur les pratiques commerciales d’Amazon. Dorénavant, la Commission européenne a acquis la conviction que la marketplace outre-Atlantique se sert de sa position ultra dominante en France et en Allemagne. D’autant que comme le rappelle la Commission, les revenus du commerce en ligne sont passés en Europe de 375 milliards d’euros en 2015 à 720 milliards cette année.
“Plus de 70 % des consommateurs en France et plus de 80 % des consommateurs en Allemagne ayant effectué des achats en ligne ont acheté quelque chose sur Amazon au cours des 12 derniers mois”, précise la Commission.
Comme le souligne Bruxelles, Amazon est également un détaillant sur sa propre plate-forme. Le géant américain est ainsi directement en concurrence avec les vendeurs tiers qui opèrent par son entremise.
“Amazon a, par exemple, accès aux données sensibles sur le nombre d’unités commandées et expédiées des produits des vendeurs, les revenus de ces derniers sur la marketplace, le nombre de visites sur les offres des vendeurs, les informations relatives à l’expédition, les performances passées des détaillants, les réclamations sur les produits, y compris les garanties activées, etc”, précise la Commission. Et Amazon obtient ces données pour chaque vendeur, chaque produit répertorié et chaque achat sur sa plate-forme. L’enseigne se servirait actuellement des données de 800 000 de ses vendeurs actifs pour faire une étude gratuite et permanente en temps réel du marché.
“De nombreux détaillants investissent massivement pour identifier les produits d’intérêt et les proposer aux consommateurs, en prenant des risques lorsqu’ils investissent dans de nouveaux produits ou lorsqu’ils choisissent un niveau de prix spécifique. Amazon peut éviter certains de ces risques en utilisant les données des vendeurs tiers pour de telles décisions commerciales”, poursuit la Commission européenne. Cela marginalise les vendeurs tiers et limite leur capacité à se développer.
D’autre part, la Commission ouvre une nouvelle enquête sur la “Buy Box” et sur le “label Prime” du géant américain. Utiliser la “Buy Box” est crucial pour les vendeurs de la place de marché, car il semble que plus de 80 % de toutes les transactions sur Amazon soient acheminées par son intermédiaire. De même, il est essentiel pour les commerçants indépendants de pouvoir vendre leurs produits sous le label Prime, le programme de fidélité de la plate-forme.
“Notre préoccupation est qu’Amazon puisse pousser artificiellement les détaillants à utiliser ses propres services connexes. Cela pourrait potentiellement enfermer durablement un nombre croissant de vendeurs dans l’écosystème d’Amazon”, note Bruxelles. Et la Commission d’ajouter :
“ Nous voulons nous assurer que les vendeurs qui n’utilisent pas les services de logistique et de livraison d’Amazon aient également une chance de bénéficier des mêmes opportunités sur la plate-forme d’Amazon.”