Le marché de l’animalerie, aux 5,4 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2021, se porte bien. Tout comme les fabricants français de petfood, dont le chiffre d’affaires a augmenté de + 3% (d’après Xerfi Precepta). Toutefois, la filière doit pallier l’inflation, améliorer le bien-être animal et affronter la grande distribution.
A partir du 1er janvier 2024, oubliés les chiens et chats en animaleries, pour des “raisons éthiques et sanitaires“ fixées par la loi contre la maltraitance animale. De même, une charte signée entre le gouvernement et Leboncoin encadre la vente en ligne des animaux. Pour le secteur de l’animalerie, la performance est ailleurs. Il s’agit de prioriser sur l’offre et la demande du marché : la France comptait en effet 15,1 millions de détenteurs de chats et 7,5 millions de propriétaires de chiens en 2020 selon la Facco (Fédération européenne de l’industrie des aliments pour animaux familiers). Et si les félins et canidés portent de loin le marché (vs basse-cour, rongeurs, oiseaux et poissons), le confinement a accéléré la tendance. Alain Bodet, responsable du développement franchise et affiliation chez Médor et compagnie (56 magasins) en témoigne : “La Covid a multiplié les adoptions en refuge et les ventes chez les éleveurs. A priori, le marché continuera de bien se porter. Chez Médor et compagnie, l’alimentation des chiens et des chats constitue entre 50% et 60% du chiffre d’affaires.“ Le franco-belge Tom&Co (50 magasins ; CA 2021 : 260 M€), constate aussi une hausse d’adoptions (via des associations partenaires) et une forte progression de son activité globale. Guillaume Papillon, directeur des opération, indique d’ailleurs :
“Nous avons enregistré +30 % l’an dernier sur nos ventes et, sur les cinq dernières années, une progression globale de + 155 %.“
Chez Terranimo (52 magasins), “40 % du chiffre d’affaires se fait autour des chiens et chats“, selon les propos de son p-dg, Frédérik Janssens. Avec toutefois, une légère stagnation pouvant s’expliquer par le fait que “les propriétaires vont à l’essentiel pour leurs animaux en raison de facteurs tels que l’inflation ou les ruptures de stock avec les fournisseurs.“
Quant aux ventes en ligne, elles progressent, portées notamment par les ventes de ‘petfood’ et les nombreux e-commerçants qui se positionnent sur ce créneau. Malgré une hausse de 15% donc, elles rivalisent toutefois difficilement avec l’activité du magasin physique. “Il faut se différencier de ce qui est proposé sur internet, lancer des marques propres, comme la nôtre, Yock, et des services exclusifs. Améliorer l’expérience client est aujourd’hui notre leitmotiv ! C’est comme cela que nous garderons les clients, même s’ils achètent sur le net“, explique Frédérik Janssens, favorable à l’omnicanalité.
Comme pour Tom&Co, chez qui le “gros du chiffre d’affaires est réalisé en magasin“, précise Guillaume Papillon, “même après avoir mis en place le click & collect avant le confinement.“ Le challenge, désormais, des animaleries ? Revendiquer leur originalité face à la grande distribution qui s’impose. Comme Mars Petcare qui inaugurera ses usines du Loiret d’ici 2025 (85 millions d’euros investis), Royal Canin modernisant ses usines du Gard (46 millions d’euros investis) et Carrefour innovant avec des snacks bios pour chiens et chats. Et ce, autour d’un marché alimentaire animal pesant près de 4 milliards d’euros ! Il s’agirait même de la troisième catégorie d’épicerie en France selon GFK/Purina. Aussi, la riposte s’organise, chaque enseigne apprenant à se diversifier. “Vingt magasins disposent déjà du service toilettage. Nous souhaitons, d’ici l’année prochaine, mettre en place dans les magasins qui s’y prêtent, des parcours d’agility avec la présence d’éducateurs canins pour renforcer l’expérience client“, envisage Alain Bodet de Médor et compagnie.
Quant à Tom&Co, l’enseigne privilégie le travail sur l’éducation canine. “C’est en cours de réflexion, confirme Guillaume Papillon. Nous aimerions aussi proposer des formations de premier secours. Et développer le massage canin…“ Du côté de Terranimo, on privilégie aussi les soins en magasin. “Nous commençons à installer des salons de toilettage sur le réseau et songeons même à un service de dogwash“, déclare Frédérik Janssens. En termes de produits, l’enseigne souhaite également miser sur la profondeur de gamme : “L’objectif est de convenir à tous les besoins des chiens et des chats tout au long de leur vie, avec une offre de qualité qu’on ne retrouve pas ni en grande distribution ni chez les vétérinaires.“ Mais à quel prix ? Selon Guillaume Papillon de Tom&Co, “il faut permettre à quelqu’un ayant peu de moyens de trouver de bons produits pour son animal. Cela passe par limiter les hausses en négociant avec les fournisseurs et en faisant attention à l’impact des marges pour les franchisés.“ Pour autant, les prix rebaisseront-ils après la crise ?
Le réseau Médor et compagnie, lui, envisage des “investissements auprès de fournisseurs de produits naturels.“ Et dispose déjà d’une offre de vrac et de ‘barf food’, un concept anglo-saxon basé sur la vente d’aliments crus et non-transformés. “Le barf représente actuellement 2,5% de notre chiffre d’affaires. Ce segment permet de développer des ventes complémentaires. Les consommateurs étant de plus en plus attentifs à leur alimentation, ils le sont aussi, par extension, envers leur animal !“, rappelle Alain Bodet. La production d’aliments bio et naturels a augmenté. Et ce, de + 21% selon l’Agreste. Pour autant, cette tendance vaut-elle pour l’alimentation animale ? En effet, attention à l’anthropomorphisme ! Et Frédérik Janssens de mettre en garde :
“Le bio ? C’est un coup de pub. Et un marché très restreint, pas suffisamment mature. Il ne représente même pas 1 % des parts du marché. Au-delà de ce phénomène de mode, n’oublions pas les besoins de l’animal !La composition des produits, les taux de protéines, etc.“
Pour l’heure, il n’y a pas de recette miracle chez les fabricants. “Nous avons quelques gammes bio pour chiens et chats sur des produits humides. Pour les secs, c’est plus complexe en termes de composition, au niveau de la qualité et du cahier des charges, par exemple. Les solutions en bio sont difficiles à envisager. Le positionnement du prix risque aussi de ne pas passer« , soulève Alain Bodet qui conseille de privilégier les friandises naturelles, dont la composition et la provenance sont connues. Et que dire des produits vegan ? “Nous n’en avons pas, indique Guillaume Papillon de Tom&Co. Le but est de réussir à s’assurer que ce que nous vendons, reste en lien avec les besoins de l’animal.“
L’industrie a d’ailleurs investi 164 millions d’euros dans la recherche pour améliorer les procédés de fabrication (d’après la Facco). Reste aux animaleries de faire valoir savoir-faire, bienveillance et transparence alimentaire.