Une fois lancé dans l’exploitation de votre entreprise en franchise, vous n’en pouvez plus… Le franchiseur s’immisce trop dans votre activité. Pourtant, il doit trouver un juste milieu entre sa volonté de vérifier la bonne application du concept et votre position d’entrepreneur indépendant. Essayez d’engager le dialogue et associez-vous aux autres membres du réseau pour tenter de le faire évoluer.
Si vous avez ouvert une unité en franchise mais que vous trouvez votre franchiseur trop présent, votre agacement est sûrement légitime. Même si vous devez suivre un concept, vous êtes un entrepreneur indépendant. La gestion quotidienne de la société vous incombe. “Le problème se présente parfois quand une enseigne a été très longtemps succursaliste et qu’elle veut mettre en place ce nouveau système. Il peut arriver que la tête de réseau n’ait pas forcément bien pris le temps de comprendre le métier de franchiseur, explique Caroline Morizot, gérante de CM Entreprise Conseil (stratégie, développement de franchise). Quand le franchisé se met à son compte c’est aussi pour avoir sa liberté.” De plus, sachez que si l’ingérence du franchiseur est avérée, il peut être condamné et la franchise requalifiée en contrat de travail. Mais cela est un cas extrême. Il faut donc en premier lieu définir ce qu’est un franchiseur envahissant. “Il y en a qui sont très présents mais qui apportent tellement de valeur à leur réseau que les franchisés réussissent bien. Mais il faut que la relation de business soit équilibrée”, tempère Laurent Dubernais, président d’AGT (mise à disposition de plates-formes collaboratives de pilotage et d’animation des réseaux de franchise). Ainsi, il est normal et même indispensable que le franchiseur soit présent, le problème est quand il outrepasse ses fonctions, comme l’illustre Caroline Morizot. “Par exemple en ce qui concerne le terrain, il s’agit de l’opérationnel et cela doit être respecté. Le franchiseur ne doit pas intervenir dans l’unité du franchisé sans son autorisation ou encore exiger des chiffres ou données auxquelles il ne doit pas avoir accès. Pour tout ce qui est lié au logiciel de gestion, il peut aussi y avoir des limites d’accès. Il doit se contenter de demander les données prévues dans le contrat. Parfois même dans ce dernier, le franchiseur va trop loin. Il faut faire attention.”
Des actions communes
Le mieux est d’essayer de trouver un arrangement et de ne pas tout de suite aller à la confrontation. Il faut tenter d’ouvrir le dialogue. “Les réseaux possèdent souvent des commissions de franchisés. En général, quand le franchiseur va trop loin, il ne le fait pas qu’avec une seule personne. Il faut donc en discuter avec les autres. Puis aller lui en parler ensemble. L’objectif est quand même d’éviter le contentieux. Il s’agit de trouver des solutions pour que la situation évolue. Il est peut-être de bonne foi. Parfois le franchiseur, notamment dans les jeunes réseaux, ne perçoit pas le problème, il manque de recul. La commission peut permettre de faire évoluer les choses avant d’aller tout de suite voir un avocat”, conseille Caroline Morizot. Laurent Dubernais plaide aussi en faveur du dialogue. “La première étape est d’en parler avec l’animateur. Par exemple, en lui rappelant ce qui a été défini dans le contrat, ce que le franchiseur doit apporter, ce qu’il ne doit pas faire.” L’avoir bien analysé en amont est donc un point crucial. Vous faire accompagner pour l’étudier peut s’avérer bénéfique pour voir si, au-delà des obligations légales, l’état d’esprit du franchiseur vous convient vraiment. Si ces actions n’ont aucun impact, vous pouvez commencer à être plus formel, par exemple en envoyant un courrier qui explique par écrit les ingérences constatées. Tout en essayant de rester dans une volonté d’accord à l’amiable. “Il faut y aller crescendo, il y a une relation de confiance et il faut essayer de ne pas la casser”, conseille le président d’AGT.
Une procédure
Si vraiment le franchiseur ne veut pas évoluer et que vous estimez qu’il s’agit d’ingérence contraire à la franchise, la prochaine étape est de se rapprocher d’un avocat. Le mieux étant d’en trouver un spécialiste dans le commerce associé pour être le mieux informé. Dans un premier temps, il pourra vous dire si votre démarche est bien légitime. Caroline Morizot rappelle qu’un avocat peut jouer le rôle de médiateur. “Un avocat peut être un moyen de négocier. C’est aussi son rôle.” C’est également le cas de la Fédération française de la franchise. En cas de situation bouchée, il reste l’option d’engager des poursuites avec un avocat. “L’objectif est d’éviter cela, mais parfois c’est incontournable”, reconnaît Caroline Morizot. Là encore, le mieux est d’essayer de trouver un accord, par exemple pour une sortie du réseau sans pénalité. Pour avoir plus de poids, il ne faut pas hésiter à mener des actions communes avec les autres franchisés qui sont dans la même démarche. Enfin, si l’affaire va devant les tribunaux, il faut bien avoir conscience que la procédure peut être longue, comme l’atteste l’expérience de la gérante de CM Entreprise Conseil. “En moyenne cela dure entre trois et quatre ans.”