Suite à la publication d’un article au sujet de la procédure de redressement judiciaire de sa société, et aux nombreux commentaires laissés par les Internautes, Hapsatou Sy a accepté de répondre aux questions de la rédaction et de revenir sur les différentes allégations.
Comment vivez-vous les accusations des Internautes ?
Je pense que ceux qui ne sont pas au courant du fond du dossier et qui lisent les propos diffamatoires et calomnieux de certains franchisés ne peuvent qu’être choqués. Pour juger de mon comportement, il faut simplement avoir les deux versions. Je suis très choquée par les accusations qui me sont faites, car fausses pour la plupart. Dans mon projet, il n’y avait que bonne volonté et l’envie de permettre à des femmes de vivre l’entrepreneuriat avec mon aide. Je souhaitais rendre ce que la société m’avait donné. Ces femmes qui m’accusent de comportements et d’actions graves, sont les mêmes que j’ai rencontrées à plusieurs reprises ces derniers temps pour tenter malgré leurs agissements parfois graves de les sortir des difficultés qu’elles rencontraient. Je rappelle que certaines d’entre-elles ne faisaient plus partie du réseau depuis plusieurs mois.
Comment réagissez-vous face au reproche qui vous est fait de ne pas assumer vos responsabilités ?
J’assume parfaitement mes responsabilités. Je suis celle qui a initié ce projet et je suis gérante de ma société, donc parfaitement responsable de ce qu’il se passe. Je ne l’ai jamais nié, et mon communiqué de presse ne laisse absolument pas entendre que je ne serai pas responsable. Néanmoins, les propos qui me sont attribués notamment sur Closer, ne sont pas les miens. Je n’ai absolument pas répondu à une interview pour ce magazine à ce sujet.
Ma responsabilité majeure était de ne pas laisser ces femmes continuer dans une voie qui n’était pas la leur afin d’éviter toutes conséquences dramatiques. J’ai pris la décision d’arrêter ce projet et elles l’ont pour la plupart compris (puisqu’elles m’ont adressé des mails disant qu’elles comprenaient). Certaines ont souhaité continuer quand même. Je n’en suis pas responsable. Elles sont libres.
Je ne souhaite viser personne directement, car je pense que la violence de leur propos vient du refus d’accepter aussi leurs responsabilités et leurs échecs. Elles étaient toutes majeures et responsables et ont agi en toute liberté mais j’ai eu à gérer des situations insupportables nées de leur manque d’expérience.
Des insultes aux clientes gravissimes, des fermetures improvisées d’espaces pour partir en vacances, l’utilisation de produits qui n’étaient pas ceux référencés, des encaissements de chèques clients alors même qu’elles étaient fermées depuis plusieurs semaines, des offres sur des sites marchands alors qu’elles savaient parfaitement qu’elles ne pourraient pas les honorer, des salariés de leurs franchises m’appelant pour exiger des salaires que je ne devais pas personnellement, et des centaines de réclamations clientes que je continue aujourd’hui de gérer dont certaines pour des prestations effectuées par elles-mêmes alors que non qualifiées et occasionnant jusqu’à des brûlures à certaines de mes clientes.
Tout cela ne pouvait pas continuer pour une jeune entreprise comme la mienne.
Il est vrai que j’ai bloqué volontairement les commandes puisqu’elles ne payaient plus depuis des mois, mais continuaient de commander. J’ai indiqué que les commandes ne seraient désormais livrées qu’à réception des paiements, car pour ma part j’étais responsable envers les fournisseurs et ne pouvaient plus supporter le cumul des dettes que cela occasionnait.
Il est vrai que j’ai également suspendu les accès informatiques après plusieurs mois de patience sans paiement, et suite à la résiliation de leur contrat de franchise.
J’assume donc pleinement la responsabilité de mes actes. Il était temps de mettre un terme à tout cela. Mes clients n’ont pas à être les otages de ma volonté de former et d’accompagner ces femmes.
Que répondez-vous à l’accusation qui est faite au sujet d’une dette envers l’Urssaf ? Quel en est le montant réel ?
Une entreprise en redressement judiciaire est par définition une entreprise qui n’arrive plus à faire face à ses factures, et qui a donc naturellement des dettes. La grande majorité des entreprises françaises sont endettées et même l’état lui même ! Je réponds que la loi ne permet pas l’ouverture d’un redressement judiciaire si une entreprise est redevable de parts salariales.
Lors de l’ouverture de la procédure, je devais la somme de 300 000 euros, je me suis présentée au tribunal avec cette somme bloquée sur un compte judiciaire, le tribunal a pris la décision de les attribuer au financement de la période d’observation, c’est-à-dire les mois qui suivaient l’ouverture de la procédure. Je me suis donc engagée à les verser à titre personnel.
Nous avons été reçus au tribunal mercredi 13 mars, et nous avons soumis un nouveau protocole d’investissement prévoyant l’injection de fonds amplement suffisants à la pérennisation de notre société et au paiement de l’Urssaf conformément à mes engagements.
Un problème d’impayés envers les prestataires a également été évoqué par les Internautes. Qu’en est-il ?
Oui, il existe des impayés fournisseurs. Nous continuons à travailler avec eux dans des relations apaisées. Pour certains, cela a été plus difficile à comprendre et je le conçois. À compter de l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire, nous avons l’interdiction de régler toutes dettes antérieures. C’est la loi, le faire est considéré comme un délit sanctionné. Je ne peux donc pas le faire. Ils connaissent la procédure. Ils doivent déclarer leur créance pour pouvoir être payés.
Votre programme “100 femmes ont décidé de changer de vie” prévoyait des aides pour les franchisées. En quoi consistaient-elles et ont elles été suivies des faits ?
Le programme prévoyait une aide de ma part de 50 000 euros à taux 0. Les autres aides étaient celles diffusées sur le site et parfaitement honorées par nos partenaires. Elles ont bénéficié d’aide comptable gratuite, d’assurance gratuite, de stocks gratuits, de matériels gratuits.
Au-delà des 50 000 euros sur lesquels je m’étais engagée, et devant la rétractation de banques et autres organismes, j’ai investi jusqu’à 300 000 euros voire plus sur certaines. Je n’ai pour une grande partie d’entres elles, récupéré aucun euro.
Certaines d’entres elles ont mis des fonds personnels, ce qui est normal lorsque l’on entreprend. Cependant, je tiens à rappeler que bon nombre de fois, je les ai invitées à limiter les investissements travaux et emplacements, elles en ont décidé autrement. Préférant investir des fonds personnels pour se permettre plus de luxe.
J’ai été clair sur ce que je pouvais faire ou non. Il ne s’agit pas de m’accabler à présent en indiquant que je n’ai pas honoré mes engagements. J’ai été bien au-delà.
Connaissez-vous beaucoup d’entreprises en France qui prêtent à leurs franchisés de 200 à 300 000 euros à taux 0, avec un décalage d’un an pour payer leur première mensualités ? Il s’agissait d’une franchise d’un genre nouveau, risqué, personne ne l’avait fait avant.
J’assume mes responsabilités, mais il convient d’assumer les siennes. Le deal était clair ! Il fallait se battre pour y arriver et ne pas attendre des mois, que je sois là pour tout !
Votre forte présence dans les médias, et notamment l’émission le Grand Huit, a pu donner le sentiment que vous aviez laissé de côté votre entreprise. Qu’en est-il ?
Je n’ai jamais laissé de côté mon entreprise qui est ma priorité. Il n’y a qu’en France que l’on a pas le droit de faire plusieurs choses à la fois sans être critiquée.
Je travaille 16 heures par jour, soit 112 heures par semaine ! Faut-il que je demande l’autorisation de faire 3 heures de ce qui me plaît par jour ?
Dire cela, c’est ignorer tous mes collaborateurs qui développent à mes côtés l’entreprise. Je suis à leur côté, au quotidien.
Comment voyez-vous l’avenir de votre structure et des différentes unités (succursales comme franchises) dans les prochains mois et sur le long terme ?
Nous procédons actuellement à une restructuration importante dans laquelle notre objectif est de pérenniser l’emploi et nous recrutons car nous refusons actuellement bon nombre de rendez-vous. Notre société devrait atteindre la rentabilité en fin d’année si on nous laisse nous concentrer sur nos priorités.
Il nous reste à ce jour une franchise à Rouen qui est en bonne voie et qui faisait partie du programme, pour certaines autres femmes, elles continuent à nos côtés, en association pour leur permettre d’y arriver.
Dans les commentaires, il était dit qu’il ne restait plus personne de ce projet à nos côtés. Cela est faux. Je continue à travailler avec plusieurs d’entres elles qui continuent à piloter des points de ventes.
Quelle expérience tirez-vous de ces difficultés ?
Ma vie d’entrepreneur est parsemée de difficultés, d’échecs mais aussi de succès et de belles expériences. Cela a toujours été, et cela continuera.
Je me rends compte qu’il aurait fallu que je sois plus patiente, et que je pense à moi avant de penser aux autres.
Que très peu de gens assument leurs échecs et qu’il leur faut peut-être pour mieux le vivre chercher des responsables quand bien même ceux-ci ont fait pour eux ce que personne d’autres n’auraient fait pour elles.
J’ai mis la trésorerie de mon entreprise pour les aider, je suis caution personnelle de leur entreprise pour certaines. Elles semblent l’oublier.
Je les ai formées durant plus d’un an gratuitement en donnant de mon temps et de mon argent.
Si c’est que l’on appelle de l’escroquerie ! Je suis sidérée.
Je continue dans ma voie, pour tous ceux qui sont l’entreprise aujourd’hui et ce sont plus de 100 emplois créés.
J’ai commis des erreurs évidentes, je sais maintenant que ce sont des erreurs. Je n’ai pas besoin d’accuser qui que ce soit pour m’en rendre compte. Je les assume.
Quel message souhaitez-vous faire passer à vos franchisés et salariés ?
À mes ex-franchisés, je comprends votre colère. Un échec est toujours difficile. J’ai voulu vous aider, et vous le savez. Vous m’avez écrit souvent pour me le dire. Relevez-vous et avancez. Il n’a jamais été question de vous accabler, bien au contraire, vous avez essayé. Mais vous connaissez aussi vos erreurs.
Votre échec est aussi le mien. Le projet des 100 femmes étaient un projet ambitieux et risqué. Personne ne l’avait tenté ainsi. Nous avons pris des risques ensemble, c’est la loi de l’entrepreneuriat.
À mes salariés, ils me connaissent et savent à quel point je me bats pour mon entreprise, à quel point j’aime mes clients, à quel point j’aime ce que je fais.
Je continuerais à me battre pour ceux qui ont cru en moi.
J’invite les femmes qui estiment avoir des choses à me reprocher, plutôt que de s’écharper sur Internet, à venir témoigner sur une vidéo que je diffuserai sans censure et je pourrais ainsi répondre à vos accusations. Vous estimez ne pas avoir la parole, je vous la donne.
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